Promenade... agréable [PV Plagio] TERMINE

Maeya fut émerveillée par ce qu’elle découvrit. En fait, c’était la première fois qu’elle entrait dans la forêt. Elle était déjà venue sur le territoire de l’eau, mais s’était limitée aux chutes d’eau. Ce qu’elle voyait, l’immensité du décor, l’impressionnait. Mais ce n’était pas ce qui lui plaisait le plus. Ce qui la rendait réellement heureuse, c’était la présence du loup à côté d’elle. Plagio… Il était si gentil avec elle, et… elle… elle ressentait toujours cet étrange effet qu’il lui faisait. Elle avait encore envie de se coller contre lui, mais n’osait toujours pas le faire.

Puis elle se souvint qu’il l’avait invité afin qu’elle l’aide à trouver certaines plantes dont il avait besoin pour soigner des patients. Il était médecin… Il aidait les gens à ne pas souffrir. Elle aimerait bien pouvoir en faire autant… Mais ce n’était pas dans ces connaissances. En fait, ce devait être si difficile… Elle l’admirait, pour sa force et son courage intérieur. Courage qu’elle ne partageait pas… Elle avait tant envie de lui dire ce qu’elle ressentait, mais en avait peur. Elle attendrait d’être certaine qu’il ressente la même chose pour elle. En attendant…

- Alors, par où commençons nous?

Elle soupira. Il faudrait bien qu’elle ose un jour. Et puis, le loup de l’eau était si gentil et compréhensif, il ne la jugerait pas, non? Ils pourraient toujours rester de bons amis, si c’était tout ce qu’il pensait d’elle. Elle, elle n’avait plus de doute : elle ressentait plus que de la simple amitié pour lui.

Le choix était très facile. En repoussant le devoir, bien qu’elle savait que ce n’était pas la bonne chose à faire, ils passeraient plus de temps ensemble. Ils ne seraient pas pressés par la perte d’efficacité de la plante, et pourraient discuter autant qu’ils le voulaient. Enfin, discuter… ils ne parlaient pas vraiment… Mais quand même… Elle voulait le sentir près de lui. Non, pas que ça. Elle voulait se coller contre lui, lui donner des coups de langue affectueux, le mordiller gentiment pour rire, lui chanter des chansons… Pourtant, elle avait toujours peur de faire les premiers pas. Dans le fond, il était si gentil! Il devait être comme cela avec tout le monde… Peut-être n’était-elle pas la seule et se berçait-elle d’illusions…

Et puis… Il avait besoin de la plante pour guérir un loup, ou une louve. Retarder l’échéance, c’était priver ce loup ou cette louve. Et Maeya compris qu’elle retardait déjà l’échéance depuis un moment. Aux chutes, elle avait attiré Plagio de sa voix… Puis il l’avait suivit jusqu’à la plage… Un loup allait peut-être mourir, s’il n’était pas déjà mort, et tout cela à cause d’elle. Mais peut-être n’était-ce pas si urgent? Alors, la solitaire et le loup de l’eau pourraient passer plus de temps ensemble. Sans s’en rendre compte, elle se colla un peu contre le flanc de Plagio, avant de parler.

- Le choix est difficile… Cela dépend. As-tu un besoin urgent de cette plante? Le loup qui en a besoin va-t-il mourir s’il ne l’a pas bientôt? Si la réponse est non, peut-être vais-je avoir l’air méchante, mais je préfèrerais d’abord découvrir la forêt. Sinon, nous devrions quérir la plante et l’amener rapidement au malade.

Encore une fois, elle venait de passer pour une idiote. Elle s’en rendait compte maintenant… Plagio ne lui aurait pas proposé de lui faire visiter si ça avait été urgent. Mais elle ne reparla pas, et attendit sa réaction. Et puis si elle parlait, elle dirait de nouveau une chose probablement stupide, alors…

Maeya laissa Plagio ouvrir la marche, ne lui laissant qu’un pas d’avance et restant collée contre lui. Elle ne voulait pas se séparer. Et puis, il ne semblait pas détester cela non plus. Autour d’eux, le paysage évoluait, si magnifique, inspirant à la fois un côté mystique et serein. C’était… magique, tout simplement. Mais elle n’en avait rien à faire. Ce qu’elle regardait, c’était le loup de l’eau. Sa fourrure bleue… s’harmonisant si bien avec le décor… et ses muscles… ce n’était pas la première fois que la louve les remarquait, mais elle les appréciait toujours autant. Les mouvements du loup étaient… fluides. Il était heureux, ça se voyait. Et elle aussi l’était.

- Plagio… Je suis si contente d’être à tes côtés.

Son cœur accéléra. Elle avait beau se répéter qu’il était gentil, et que peu importe qu’il ressente ou non la même chose pour elle, elle avait peur. Peur qu’il ne veuille plus lui parler… Pour se donner du courage, elle décida de tourner autour du pot, regardant sa réaction au fur et à mesure. Elle modifierait la chute si elle sentait qu’il était pour le prendre mal, dans le pire des cas.

- Je me sens bien, lorsque tu es là. J’ai toujours eu peur de rencontrer des mâles… Après ce qui m’est arrivé… Pourtant, je me sens en sécurité avec toi. Tu es si gentil, et pour la première fois de ma vie, j’ai l’impression d’avoir de l’importance, d’être plus qu’un simple solitaire égarée qui n’arrive pas à se mêler à aucune meute… Je peut à nouveau connaître l’espoir, grâce toi. L’espoir d’un avenir paisible et heureux.

Peu importait sa réaction en fait. Elle devait le dire. C’était ce qu’elle ressentait, elle ne pouvait pas lui mentir.

- L’espoir d’un avenir… avec toi. Plagio, je veux que tu deviennes… mon… compagnon.

Le dernier mot fut dur à prononcer. Énormément dur. Mais ce n’était pas de la peur qui l’avait fait hésiter. Elle comprenait qu’elle venait de faire preuve d’un acte de courage immense. Elle venait de mettre de côté ce qu’elle avait pensé jusque là des mâles, admettant que certains d’entre eux pouvaient être doux et gentils. Pas que ça : après toutes ses années de solitudes, qu’elle avait combattu pour conserver, d’une certaine façon, elle venait de faire le vœux de ne plus jamais être seule. Et elle ne regrettait rien.

Maeya s’en voulut d’avoir parlé. Elle savait que Plagio l’avait entendu, même s’il continuait de marcher. Son cœur battait plus vite, elle le sentait. Il l’ignorait… Il faisait comme si elle n’avait pas parlé… Une larme perla au bord de son œil. Elle l’avait blessé en lui faisant cette proposition, elle n’aurait pas dû. Maintenant, il cherchait un moyen de lui dire qu’il ne ressentait pas la même chose sans lui faire de mal. Encore une fois, elle avait été idiote. Elle avait cru que tout pouvait aller pour le mieux… C’était totalement faux…

"Je…"

Elle vit les larmes couler sur ses joues. Pourquoi pleurait-il? Parce qu’il ne trouvait pas de paroles qui n’étaient pas blessantes à lui dire? Elle avait le goût de lui dire de ne pas se retenir, de lui crier dessus s’il le voulait, d’être aussi blessant qu’il le souhaitait, de lui avouer qu’il ne voulait plus d’elle dans sa vie. Elle était idiote, elle le méritait… Elle avait cru qu’il pouvait ressentir pour elle la même chose qu’elle ressentait pour lui. Elle n’arriva plus à retenir ses larmes, qui coulèrent en silence.

Puis il se retourna. Voilà, il allait la chasser à jamais du territoire de l’eau. Elle voulut se retourner et s’en aller, en lui disant qu’il n’avait pas à gaspiller sa voix pour elle, qu’elle savait ce qu’il pensait, mais ne pouvait pas le faire. Il restait en elle une touche d’espoir. Celui qu’elle se trompait et que Plagio allait lui avouer son amour.

Elle croisa son regard. Elle n’y distinguait pas de fureur, au contraire. Ce qu’elle y voyait, c’était de l’amour, ou de la compassion… Comment savoir… Il posa sa tête sur l’épaule de la louve, qui eut à peine le temps de se demander ce qu’il faisait qu’il terminait la phrase qu’il avait plus tôt commencée.

"T’aime…"

Il avait semblé à la louve qu’une éternité s’était passée entre les deux moitiés de phrase, et pourtant elle savait que ce n’avait été qu’une question de seconde. Il lui fallut d’ailleurs quelques secondes, justement, pour comprendre toute l’implication de ce que ça voulait dire, et de ce que l’absence de suite signifiait. Elle avait cru qu’il allait rajouter quelque chose comme : mais simplement en ami. Non. Il… il avait tout simplement accepté d’être son compagnon. Une nouvelle larme coula. Cette fois, ce fut une larme de soulagement, de bonheur, de pure émotion positive. Elle n’avait pas cru un instant qu’elle finirait par pouvoir être autant heureuse.

Elle se colla plus contre lui. Elle ne voulait pas qu’ils se séparent, elle ne voulait même plus découvrir la forêt. Elle voulait profiter du moment et du bonheur qui s’offrait à elle. Sans oser parler. Tout ce qu’elle voulait, s’était sentir le corps du loup de l’eau contre le sien, en se disant que jamais elle n’aurait pensé que la présence d’un mâle puisse être si exquise, et lui faire tant d’effet, et d’un effet si positif. Pourtant, elle savait qu’ils ne pourraient rester ainsi éternellement.

Maeya se décolla de sur Plagio. Elle fit lentement le tour du loup de l’eau, se frottant contre lui, et s’arrêta lorsque son flanc fut collé contre le sien, leurs deux visages assez rapproché pour qu’ils partagent le même air. Elle avait tant envie de lui, et se trouvait si chanceuse! Il l’aimait lui aussi! Un médecin, si dévoué à son clan, avait accepté d’être son compagnon à elle, une solitaire insignifiante… Étrangement, elle avait un peu peur. Cela avait été si facile, ça ne pouvait pas rester ainsi… Mais en attendant que quelque chose vienne lui prouver le contraire, elle entendait bien profiter du bonheur qui s’offrait à elle. Après tout, pourquoi n’aurait-elle pas le droit?

Elle donna quelques coups de langues affectueux au loup de l’eau, et lui fit un sourire charmeur. Elle était si heureuse! Et elle avait tant envie de le lui partager! Elle voulait le pousser au sol, le chatouiller, rire avec lui, chanter une chanson! Toutefois… elle sentait cela au dessus de ses forces. Elle avait beau avoir franchi le pire obstacle et lui avoir avoué son amour, elle ne se sentait pas l’énergie d’aller plus loin. Elle avait peur de le contrarier. Au moins, elle savait qu’il aimait sa voix… Elle allait donc lui chanter une chanson.

- Le ciel si bleu, si plein de beauté,
Par le feuillage des arbres majestueusement voilé,
Et les branches formant un dôme bombé,
Dans une forêt si immense et pleine de gaité.

Les piaillements des oiseaux se mêlant au vent,
Deux loups amoureux se promenant joyeusement,
Elle, la grâce, la délicatesse et la beauté,
Lui, la force, la gentillesse et la pureté.

D’un azur profond, harmonieux et varié,
Se mariant au blanc éclatant et bleuté,
Des yeux jaunes brillants ne cessant de pétiller,
Se fondant parfaitement dans une mer ambrée.

Des rires, de la joie, des bribes du passé,
Entres ces deux êtres en toute confiance échangés,
Une chance, un destin, les aura rassemblés,
Et plus jamais maintenant ils seront séparés…

Ressentant des frissons parcourir son corps, elle se blotti contre lui. Elle ne voulait pas qu’ils se séparent. Et elle était assez fière de cette chanson improvisée pour lui, pour eux, pour leur amour.

- Je t’aime moi aussi. Je ne veux plus jamais te quitter.

Elle était sérieuse. Elle voulait le suivre partout où il allait, partager le moindre instant de sa vie, l’aider à soigner les gens, passer ses nuits à ses côtés, lui chanter des chansons, et… Elle voulait même qu’ils aient des enfants, pour qu’elle puisse les élever, leur chanter des chansons, et qu’ils puissent rire en famille, tous ensembles…

Avant d’avoir pu se remettre de ses pensées, Maeya se retrouva étendue sur la mousse, entre les pattes du loup de l’eau, alors que des paillettes d’or tombaient autour d’eux et que le soleil arrivait à se percer le feuillage. C’était si… parfait! Elle aurait souhaité que le temps s’arrête, et qu’il ne reparte jamais. Elle se sentait si heureuse qu’elle n’en arrivait plus à penser! Tout ce qu’il y avait dans sa tête, c’était Plagio, c’était l’univers doré dans lequel il se trouvait, donnant au médecin un air majestueux lorsqu’elle le regardait. Comme… un noble… Du moins, dans son cœur à elle, il l’était, et ce doré était pour lui. Pour toute sa noblesse d’âme, et pour elle, qui unissait son âme au sien en ce moment de… de pure magie. On aurait cru que les esprits de la forêt bénissaient le nouveau couple qui s’était formé…

Elle ferma les yeux et enfouie son visage dans le torse de Plagio. Sa fourrure était si douce, si chaude, si accueillante, et apaisante… Elle aurait pu s’endormir, mais elle ne voulait pas. Elle voulait rester éveiller pour graver l’odeur du loup de l’eau dans sa mémoire, le son de sa respiration, la sensation de ses muscles qui jouaient contre sa joue alors que le médecin inspirait profondément, le rythme des battements de son cœur… Tous ces petits détails qui lui étaient si spécifique et qui faisaient de l’effet à la louve, qui se dit que si elle avait été en chaleur à ce moment précis, ils seraient sûrement allés beaucoup plus loin qu’ils n’osaient le faire présentement…

Cela ne la dérangeait pas, de toute façon, elle n’avait pas envie de se prendre la tête avec des détails. Elle voulait profiter, elle voulait juste ne plus jamais s’en aller. Mais la perfection n’est pas éternelle… C’est pour cela qu’elle devait en profiter au maximum. Elle décolla son visage et commença à lécher tendrement la gorge de Plagio, profitant des frissons qu’elle ressentait. Elle n’était pas certaine pas de comment réagirait le loup de l’eau, mais elle savait qu’il ne réagirait pas mal, car il l’aimait aussi. Et si il trouvait cela désagréable, il le lui dirait gentiment, et elle arrêterait.

Maeya sentit le coup de langue et arrêta de lécher Plagio. Elle releva le regard et le regarda dans les yeux. Ses yeux si brillants… Si lumineux… À la légère lueur dorée qui descendait du feuillage, enfin, qui semblait descendre du feuillage, ils étaient encore plus… encore plus beaux. Plus éclatants. Plus… amoureux… Elle avait tant envie de lui… et ne revenait toujours pas que rien ne vienne briser ce moment magique. Le silence, toutefois, commençait à lui peser. Elle voulait parler… Mais elle ne voulait pas tout gâcher. Pourtant, son cœur ne cessait de lui dire qu’elle devait s’exprimer.

Plagio… Avant de te rencontrer, j’ai toujours eu peur des mâles… Les seuls que j’ai rencontrés ont essayé de me tuer. Je croyais que les mâles étaient tous violents, impulsifs, arrogant, et prêt à tout pour avoir ce qu’ils n’ont pas, même le mal… Mais tu as été gentil avec moi, doux, compréhensif. Tu m’as montré que les mâles peuvent… Qu’il est possible de vouloir la présence d’un mâle à ses côtés. Et je t’en suis énormément reconnaissante. Et maintenant… maintenant que j’ai goûté à ta douceur, je ne veux plus jamais m’éloigner de toi. Je ne veux plus te quitter. Je ne veux pas être seule à nouveau. Promets-moi de ne jamais m’abandonner, Plagio…

Elle lui fit un sourire aimable. Elle le savait, qu’il allait le lui promettre, ça se lisait dans ses yeux. Elle était capable de suivre le fil de ses pensées, comme s’il était nu, sans protection aucune. Et elle savait qu’il en était de même pour elle. Incapable de se retenir, elle n’attendit même pas qu’il est répondu et commença à lui mordiller gentiment l’oreille. Elle avait envie de le taquiner un peu, et elle voulait qu’il réagisse et lui rendre, aussi. Mais s’il ne le faisait pas, ce n’était pas grave… Ce n’était peut-être pas son style de montrer ses émotions comme cela. En fait, Maeya n’aurait jamais fait ça en temps normal. Mais avec le loup de l’eau… Elle se sentait si différente!

Le cœur de Maeya s’emballa. Elle était maintenant couchée sur le dos, Plagio au dessus d’elle, l’emprisonnant de ses pattes. Sa respiration s’accéléra. Allait-il…? Un frisson intense la parcourut lorsqu’elle sentit la langue de Plagio lui chatouiller tendrement le museau. Un instant, elle cru que son cœur s’était arrêté et qu’elle était morte. Mais comme elle arrivait encore à penser, cela prouvait que non. Elle sentit son cœur recommencer à battre, beaucoup plus lentement que précédemment. Ou était-ce sa perception du temps qui était abusée?

Elle le laissa faire un moment. Un long moment. Enfin, selon elle… Peut-être n’avait-il pas été si long que ça… Mais elle décida d’y mettre fin. En faisant un gros sourire moqueur, elle lui donna un coup sur l’une des pattes arrières. Pas assez fort pour lui faire mal, juste pour qu’il tombe sur elle. Pour sentir leur deux corps collés l’un contre l’autre. Profitant de l’effet de surprise, elle lui lécha passionnément le museau, avant qu’il ne recommence et que cela ne l’en empêche.

Avant qu’il ne s’en remette et ne tente de se relever, aussi, elle le cercla de ses pattes, autant ses pattes avants qu’arrières, pour le maintenir coller contre elle. Elle n’avait pas l’intention de le laisser partir facilement, ou encore tôt. Mais de toute façon, il ne se débattrait probablement pas. Pas tout de suite… Toujours souriante, elle continua de le lécher, plus doucement par contre, en le regardant dans les yeux. Elle aurait aimé s’y perdre à jamais… Ne plus jamais revenir de ce regard, si hypnotisant… Si parfaitement parfait et sans défauts…

Maeya arrête de lécher Plagio lorsqu’elle vit les bulles monter autour d’eau. C’était si magnifique! Ainsi, c’était cela le pouvoir de Plagio… Une pointe de tristesse s’empara d’elle. Elle, elle n’en avait aucun pouvoir. Elle avait peur de s’approcher des mâles, phobie auquel Plagio semblait se soustraire, ce qui faisait son bonheur, mais… elle s’en retrouvait pas plus capable d’aider les autres. Elle chantait bien, c’était vrai, mais était incapable de chanter devant d’autres loups, sauf Plagio encore une fois. Plagio était l’exception. Le loup de l’eau était… pas parfait, rien ne pouvait l’être. Mais il s’approchait énormément de la perfection. Il pouvait aider les gens lui, il avait même un pouvoir! Bon… créer des bulles d’eau, ce n’était pas très impressionnant, mais Maeya adorait cela. Elle était mystifiée par ces orbes humides en suspension si près d’eux. Elle avait presque envie d’essayer de leur donner des coups de langues, pour se désaltérer.

Mais elle ne le fit pas, tout comme elle ne resta pas triste longtemps. Dans le fond, elle avait Plagio, et ça lui suffisait. Tant qu’il était là et qu’il l’aimait, elle était heureuse. Si heureuse… Ses pattes relâchèrent un peu la pression sur le corps du loup. De toute façon, il semblait apprécier que leurs corps soient ainsi collés l’un contre l’autre, il ne s’enfuirait pas. Elle passa minutieusement en revue le corps du mâle. Il était… beaucoup plus petit qu’elle, maintenant qu’elle regardait bien. Il semblait plus jeune aussi. Pourtant, elle se disait que d’esprit, il était le plus mature des deux… Elle revint planter son regard dans le sien. Et elle pourrait rester longtemps comme cela, à le regarder ainsi. Elle ne voulait pas que tout cela s’arrête, et ne voulais pas parler, pour pas gâcher le moment. De toute façon, elle n’avait rien à dire.

Elle se contenta donc de respirer son odeur. Après un moment, elle enfouie son visage dans le creux de l’épaule du mâle, à la base de son torse. Elle était si bien…Sa fourrure était si douce… Le son de son cœur, si apaisant… Elle pourrait s’endormir qu’elle serait certaine de faire des rêves magnifiques. Elle soupira de bonheur et de satisfaction. Pourquoi fallait-il que le temps continue d’avancer? Bientôt, ils devraient aller chercher la plante pour le patient du médecin, elle le savait. Mais elle avait l’intention de profiter de chaque seconde jusque là.

Maeya se sentit soudainement fatiguée. Depuis combien de temps n’avait-elle pas dormi? Longtemps. Et elle avait vécu tant d’émotions… d’abord la louve qui crachait du feu qui lui avait fait très peur. Puis toutes ces émotions que Plagio avait soulevées en elle. Elle devait se reposer. Elle devait prendre un peu de temps pour refaire les classements dans tout cela. Mais elle ne voulait pas quitter le confort des pattes du loup de l’eau. Elle n’avait pas vraiment le choix… Elle le regarda à nouveau dans les yeux.

- Je suis désolée Plagio, mais je sens l’envie de dormir s’emparer de moi. J’ai vécu beaucoup d’émotions, cela m’a épuisée. Pouvons-nous nous reposer un peu? Je veux que tu restes avec moi. Je veux pouvoir avoir un sommeil tranquille, pour une fois…

Elle ne pensa pas un instant qu’un patient attendait le retour du médecin avec cette plante pour le sauver. Tout ce qu’elle voulait, tout ce qui comptait, c’était que pour une fois elle pourrait dormir sans faire de cauchemar, car elle se sentirait à l’abri. Car elle se sentirait protégée. Car Plagio serait là. Elle ne savait même pas s’il lui avait répondu, elle commençait déjà à s’endormir. Ses paupières se faisaient lourdes, mais elle ne voulait pas dormir tant qu’elle n’aurait pas la certitude que son compagnon allait rester près d’elle et la protéger.

Maeya n’en pouvait plus. Elle sombra dans le sommeil en entendant la phrase que le loup prononça. Son sommeil fut… calme. Pas de rêves agités. Tout le long, elle serra tendrement Plagio entre ses pattes, léchant de temps en temps son torse ou son cou, encore endormie. Et lorsqu’elle se réveilla, elle n’ouvrit pas les yeux tout de suite. Elle pouvait sentir les pattes du médecin l’entourer et la caresser doucement. Elle aurait tant aimé rester ainsi, mais…

Elle sursauta et se redressa. Le pauvre loup de l’eau s’était endormi en veillant sur elle… Elle lui lécha le museau pour le réveiller. Lorsqu’il eut ouvert les yeux, elle lui dit doucement, pour ne pas le brusquer :

- Plagio… la plante. Je crois que nous avons perdu de vue notre objectif principal… Nous devrions aller la chercher avant qu’il ne soit trop tard. S’il ne l’est pas déjà…

Elle s’en voulait énormément. Tout cela était de sa faute. Elle avait mal choisi son moment pour avouer son amour à Plagio et n’avait pas su se contrôler. Elle regarda le sol. Si elle avait attendu un peu…

- Plagio je suis désolée. J’espère qu’il n’arrivera rien de grave, je ne voudrais pas qu’un loup meurt par ma faute.

Elle versa une larme. Elle était tellement désolée…

Maeya se calma un peu. Si cela ne pressait pas… Mais quand même, elle ne voulait pas faire attendre plus longtemps le blessé. Plus ils restaient là à se contempler l’un l’autre, plus la patient du médecin souffrait. Et il souffrait à cause de la décision qu’elle avait prise. Elle ne pouvait pas le supporter. S’il y avait bien une chose qu’elle détestait, c’était la souffrance. Et donc, si elle se calma, elle ne parût pas plus heureuse pour autant. Plagio, lui, semblait si décontracté… Peut-être que c’était réellement mineur et que le patient ne souffrait pas? Mais alors, il attendait impatiemment le retour du loup de l’eau afin de pouvoir retourner à ses activités. Non, Maeya ne pouvait pas se permettre de laisser les choses ainsi. Ils pourraient toujours passer du temps ensemble après, rien ne pressait non plus de ce côté-là.

- Plagio… Je refuse qu’un loup souffre, ou perde du temps, à cause de moi. Nous aurons tout le loisir de passer du temps ensemble lorsque tu auras terminé de le soigner. Donc, il est temps d’aller chercher cette plante. Je t’aime, Plagio. Mais je ne pourrais supporter qu’un loup m’en veule pour cette simple raison.

Et si Plagio le prenait mal? S’il croyait que Maeya avait ressentit un problème dans leur proximité et se cherchait une raison de s’éloigner? Intérieurement, la louve paniquait. Elle ne voulait pas perdre son compagnon, elle l’adorait. Elle se sentait si bien dans ses bras. Jamais elle n’avait dormi sans faire de cauchemar depuis cet atroce jour où les loup du clan du feu l’avait attaqué. Et là, cette fois-ci, elle avait tellement bien dormi. Elle avait fait de si beaux rêves. Et elle voulait tant être à jamais dans les bras de son loup d’amour… Elle espérait qu’il comprendrait qu’elle ne pouvait pas se permettre le bonheur en sachant qu’un autre loup pouvait être en train de souffrir.

Maeya soupira presque de soulagement. Plagio était si gentil, si doux, et intelligent. Il n’avait aucune raison de douter de sa compagne et elle le savait. Pourquoi avait-elle pensé cela? Comment pouvait-elle douter alors que lui lui vouait une confiance aveugle? Se reprenant, elle lui emboîta le pas en souriant. Elle se sentait comme un jeune loupiot lorsqu’elle se tenait ainsi, collée contre lui. Fragile, faible, mais en sécurité, bien protégée et confiante. Elle savait que Plagio serait prêt à tout pour la sauvegarder de la misère. Mais elle, était-elle prête à faire le même sacrifice? La réponse lui faisait peur. Non, jamais elle ne se battrait pour le secourir, elle en était incapable. À ces pensées, une larme perla à son œil. Lui il donnerait tout, même sa vie, pour elle. Mais Maeya ne se sentait même pas prête à ne serait-ce que se blesser pour lui éviter la mort! Elle était indigne d’être la compagne du médecin…

Non, elle devait se calmer. Elle ne pouvait rien savoir tant qu’elle ne posait pas de questions. Elle ne pouvait pas deviner les pensées du loup de l’eau, elle en était incapable. Mais voulait-elle réellement savoir? Elle ne pouvait pas mentir au médecin, ni rien lui cacher. Il pouvait savoir la vérité. Mais cela ne ferait-il pas du mal que de lui demander? De toute façon, il ne lui faudrait pas grand temps pour remarquer qu’elle ne se sentait pas bien et la questionner pour savoir ce qui en était. Elle devait parler. Elle s’exprima d’une voix hésitante, comme si en parlant elle brisait un tabou.

- Plagio… À quel point tiens-tu à moi? Jusqu’où serais-tu prêt à aller pour m’empêcher de connaître la souffrance?

Elle avait peur. Non pas de la réponse du loup de l’eau, mais de la réponse qu’elle-même allait devoir fournir par la suite. L’étrange ironie de la situation la fit sourire timidement. Avec Plagio, jamais elle ne s’était sentie si bien, jamais elle ne s’était senti autant en sécurité, légère, heureuse. Elle avait l’impression que le médecin était un ange qui veillait sur elle… En même temps, jamais elle n’avait eu aussi peur. Peur de perdre ce bonheur à chacun de ses mots, chacun de ses gestes. Elle n’avait jamais connu la compagnie des autres, Plagio était en réalité le premier loup qu’elle voyait depuis des années. Elle ne savait pas comment fonctionnaient les relations interpersonnelles, à tout moment elle craignait de perdre son compagnon à jamais, en le vexant, en ne se montrant pas à la hauteur de ses attentes, en se montrant indigne de recevoir sa tendresse et son affection… son amour…

Mais malgré cela, malgré toutes ces émotions négatives qui pouvaient l’assaillir, jamais elle ne renoncerait à lui. L’intensité des sentiments positifs qui s’emparaient d’elle lorsque le médecin se trouvait à côté d’elle en valaient la peine.