La solitude peut avoir ses bienfaits. [PV Asuro]

Une nouvelle terre à aborder. Encore de longues heures de marche, encore de longues heures à arpenter ces étendues infinies pour en connaître les moindres secrets. Voilà ce qu'était le but de ce loup au pelage d'un blanc immaculé que l'on voyait depuis peu parcourir le territoire, seul et d’une démarche légère. Bien que la chaleur transperçait son corps grisé par la faim et le mettait mal à l’aise, il continuait sa course. Sans but précis. Seul son instinct le guidait.

Les vagues ardentes avaient beau tendre leurs bras avec désespoir pour tenter de le happer, il reculait toujours et se dérobait à leurs vaines tentatives, reprenant à vive course alors que l’eau se retirait vers la mer d’où elle provenait, laissant le sable mouillé. Sweenty dansait avec la houle, entre terre et mer, vif et puissant. Il se sentait dans son élément. Dans celui de son clan. L'eau.
Le soleil posait avec délicatesse ses doux rayons qui mettaient en valeur son pelage blanc et le rendait encore plus scintillant. L’errance du loup l’avait conduit jusqu’ici, à la plage Naïgma, sur les terres neutres. Il ressentait le besoin de venir se confier à la mer, à cette eau déchaînée qui avait déjà emporté bien des secrets inoubliables et gravés dans la mémoire de chacun.

Sweenty se secoua, faisant voleter ses poils autour de lui. En faisant cela, il rompit ainsi son immobilité quasiment surnaturelle. Puis d’un pas assuré, il s’engagea dans la montée, entreprenant de se diriger vers la falaise.
Il était seul, comme souvent depuis quelques temps. Seul et immobile, debout sur le bord de la falaise surplombant le vide béant, le vent caressant telle une main maternelle son visage, ébouriffant ses poils. Sweenty ne voulait penser à rien, ne rien ressentir, juste faire le vide. Un vide instable. Il voulait laisser son esprit vagabonder dans une réalité qui n’était pas sienne, laisser son esprit vagabonder dans un monde qu’il s’était construit lui-même. Mais bientôt, le vent se forcit et le rappela directement à la réalité. Notre réalité. A regrets, le loup releva lentement la tête en poussant un léger soupir.
Ne sachant toujours où aller, visitant les lieux, il prit un petit chemin que rien ne vint perturber. Pas un bruit, hormis le chant discret et à la fois mélodieux des oiseaux perchés dans les arbres bordant la route. Un sourire fendit ses babines, et, le cœur léger, il s’en repartit en se remettant à courir.

Soudain, le vent frais lui apporta une odeur particulière. Celle d’un lupin, tout comme lui. Sweenty continua de courir, sans s’arrêter. Il n'avait pas peur. Si l'inconnu voulait le trouver, alors qu'il vienne là où le beau loup blanc irait.
Il ne tarda pas à arriver dans une vaste ronde bordée d’arbres, étendant paresseusement les vagues de sa mer d’herbe verte et bien grasse, venant lécher les pieds des maîtres de la nature. Une mer de couleurs flamboyantes se dessinait, allant du vert d’émeraude à la couleur des jeunes pousses ou des mauvaises herbes. Les rayons de soleil, quant à eux, tombaient avec délicatesse sur le sol et leur jeu dessinait des tâches de lumière diverses, des ombres variées et des arabesques tordues.
Lorsqu’il pénétra à l’intérieur de ce cercle de magie, on put remarquer que Sweenty n’était pas un de ceux qui passaient inaperçus. Grâce, beauté, finesse et force regroupés dans un même être. Son aura était envoûtante, elle irradiait de bonheur et de sérénité. Douceur et calme. Il secoua d'un mouvement désinvolte sa frange noire, qui lui obstruait un oeil, pour un champ de vision plus élargi. Son coeur palpitait, battant à tout rompre, suite à sa course folle. Sweenty ne chercha même pas à se cacher, pour produire un effet de surprise. A quoi bon ? Il n'était pas venu ici pour se battre, d'ailleurs il n'aimait pas ça. Il raisonnerait avant tout son ennemi, essayant de trouver de multiples arguments convaincants.

Le bruit de la mer était toujours là, apaisant et rassurant. On entendait toujours le fracas des vagues s'écrasant avec violence sur les roches, après une bourrasque de vent. Puis tout redevenait normal. L'eau s'échouait sur le sable, avançait puis se retirait jusqu'à un certain endroit et revenait, essayant cette fois d'aller encore plus loin. C'était ainsi. Depuis la nuit des temps...

Dans l'ombre des ombres, j'étais là.
Dans la lumière du soleil, ses rayons si doux et ouverts, qui lentement me réchauffaient mon pelage gris, j'étais là. J'observais. L'eau qui léchait impétueusement le sable chaud de la plage faisait des va-et-vient infinis.
Je me cachais. En quelques sortes. J'étais posté haut, sur un rocher que j'avais vu en arrivant. C'était mon point de repère. La roche était chaude te me brûlait mes coussinets. Mais cela ne m'importais peu. J'étais venu pour être seul, pour pouvoir fermer les yeux sans qu'en les rouvrant il y ait quelqu'un en face de moi pour me surprendre et me faire la morale de ne pas être sur mes terres. Je pensais aux louveteaux que j'avais croisé il y a pas longtemps. Ils me faisaient rire. Mais pas maintenant. Je ne voulais plus les voir. Je voulais rester au calme, dans le silence du clapotis des vagues sur la plage, sur le sable. Je voulais m'isoler du monde, pour pouvoir rencontrer à nouveau ces images de mon enfance. Ces images qui si longtemps me faisaient du mal.
J'avais mal au coeur. Je me sentais mal. Je rouvris les yeux, constatai avec soulagement qu'il n'y avait bel et bien personne aux alentours. J'étais couché, relaxé. Mais mon coeur me faisait si mal, tellement mal. Un noeud s'était formé dans mon ventre, ma gorge était liée. Quand j'étais arrivé ici, je pensais pouvoir rester insensible. Je pensais pouvoir rester un sans-coeur, ne plus penser à rien et suivre Pandore, tuer les autres clans, et me barrer d'ici en ayant accompli ma mission. Mais les doutes m'avaient envahis tellement de fois que je ne savais même plus qui j'étais. J'étais un loup, certainement. Un loup gris, ou plutôt un loup esprit, qui ne faisait que douter sur que faire. Je pensais être imperturbable, froid, impassible et insensible à tout ce qui m'entourait. C'est ainsi que je me croyais. Mais mon intérieur en avait décidé autrement. Je ne faisais que douter.
Je mis ma tête sur mes pattes avant tendues. Mes muscles étaient crispés. Je voulais fuir, crier ma rage envers moi-même. Sauter dans cette eau qui puait le piège et me laisser emporter par les flots, noyant mes souvenirs et mes malheurs. Mes bouleversements et mes tourments. Mais je ne fis que soupirer. J'étais faible.

Je m'assied. Il fallait que je reprenne le dessus.
Les larmes qui avaient coulées pendant mes pensées putrides finirent leur course sur le rocher plissé. Il fallait que je suive Pandore, que je suive ses envies, que je suive ses désirs. Elle était si belle, si courageuse. J'aurais tant donné pour être comme elle. Mais j'étais si faible !
Non. Il fallait que ça change. Je me relevai complètement, un visage sérieux et haineux sur la gueule. Du fond de ma gorge, pour la dénouer et faire repartir mon coeur sur un rythme normal, je lançait un hurlement mêlé avec un grognement assourdissant. Je fus moi-même étonné de sa force. Je poussai sur mes pattes avant et me lançai dans une course folle, pour oublier, pour penser à autre chose. Je n'étais pas cela. Je n'étais pas faible. Il fallait que je le prouve, à moi, et à Pandore. Il fallait que je lui apporte la tête d'un loup d'un autre clan, que je lui montre à quel point je lui étais Fidèle. Je courus à rompre mes poumons.

Puis vins cette petite plaine, entouré d'arbres feuillus. Un arbre spécialement bien placé vint dans ma ligne de mire, et je sautai sur ses branches placées basses. Facile pour grimper là-dessus. J'avais mes oreilles plaquées contre mon échine, j'étais vraiment enragé contre ma propre vie, ma propre faiblesse. Une fois placé haut je regardai au centre de la plaine, et souris nerveusement. J'avais trouvé ma victime. Un autre loup. Encore du clan de l'eau. Le même que ces deux loupiots. Il avait dû sentir ma présence, car le vent soufflait de derrière moi. Mais apparemment il n'y faisait pas attention.
Je sautai, attérissant lourdement sur mes pattes avant, et profitai de l'élan pour bondir sur le loup inconnu. Bizarrement, je ne fit que lui effleurer le flanc gauche, et allai m'écrouler un peu plus loin. Je me mis en boule, et continuai de pleurer, comme un pauvre loup. Je n'étais qu'un faible. Je n'étais pas fait pour tuer. En plus je montrais mes faiblesse à d'autres loups. Je n'étais qu'un raté. Un pauvre raté. J'hurlai ma tristesse, noyé dans les sanglots.

- Bonjour.

Le loups s'était rapproché de moi. Je sentais son souffle, sa présence, ses paroles près de moi. Juste à côté. Je sentais son aura me caresser mes poils, sa chaleur me toucher le flanc. Mais je lui tournais le dos. Je savais qu'il était là, mais je ne voulais pas qu'il me voie. Pourtant sa voix était si douce et si envoûtante, que j'avais envie que de lui faire confiance et de pouvoir le regarder droit dans les yeux, avec un regard soutenu, et pas le regard fuyant que j'avais.

- Je me nomme Sweenty. Je suis un médecin du clan de l'Eau, je ne vous veux pas de mal.

Ces mots me brisèrent les oreilles. Du silence. Il me fallait du silence. Et c'est ce qui suivit. En entendait juste le vent frais s'échouer dans les branches d'arbre, et mes petits sanglots que je lâchai pour tenter de me calmer. Je pris une grande respiration, tentant de maîtriser mon coeur qui battait si rapidement de douleur et de fatigue, puis tournai lentement, très lentement, la tête vers ce loup prénommé Sweenty.
Je le regardé de mes yeux rouges et humides, tourné sur le dos. Je me sentais soumis et à la merci de ce loup, bien qu'il avait l'air si calme et pacifiste. Il me faisait penser aux louveteaux, avec sa manière d'agir, sa gentillesse et sa manière de bouger.
*Nous sommes des loups nés de la neige*
C'est ainsi que le jeune Frost' avait décris leur histoire. Je m'en souviens bien.
Le loup à qui je faisais face était blanc comme neige, d'ailler. Il avait des cheveux noirs le long de sa nuque et ceux-ci se prolongeaient en une franche noire qui barrait son visage. Il avait plusieurs dessins sur son corps, des tatouages sûrement, un genre de bâtonnet brillant plutôt bizarre à la patte arrière, accroché à un bracelet gris. Il me regardait de ses yeux brunâtres, d'un regard doux et soutenu. Ainsi, il était médecin. Cela expliquait néanmoins son calme et sa sérénité, malgré le fait que j'aie voulu l'attaquer, le tuer. Et il le savait.

Cette pause dura longtemps. Je ne fis que le regarder de mes yeux sans pupilles, puis je me relevai, précipitamment, en profitant pour essuyer ma tête avec mes pattes. Je m'assied, plutôt maladroitement, et lui fit face comme je l'aurai fait normalement. Mon coeur battait la chamade, si bien que je le sentais au niveau de mes tempes. Non seulement j'avais la haine conter moi-même, mais en plus, pour une certaine raison, ce loup me faisait peur. Il avait beau être si calme, si tranquille, il me donnait des frissons. Un genre d'alarme sonnait en moi - Tout mon corps m'ordonnait de le tuer sur place. Mais je ne pouvais pas. Je n'y arrivais pas. Et je n'y arriverai sûrement jamais.
Un flash de ma mère, renarde blanche aux yeux si doux, me revins en mémoire. Elle s'avançait vers moi avec un grand sourire heureux. Je réprimai un nouveau sanglot, avalai mes larmes, et finis par sourire au loup qui me faisait face. Je ne savais plus que penser, mais sa tête me faisait penser à la douceur de ma mère.
Malgré tout, aucun mot ne sortit de ma bouche. Je savais bien que si je l'ouvrais, j'étais repartis pour une série de sanglots. J'avais la gorge nouée et mes pattes tremblaient. Mes muscles étaient encore serrés, près à courir si jamais il montrait le moindre signe d’agressivité.

- Tu n'as rien à craindre de moi. Je peux peut-être t'aider...

Cette voix douce et rassurante me rafla à nouveau les oreilles, que je couchai en arrière, tentant de ne plus écouter que mes poils frôlant le bout de mes oreilles sur mon échine. Cette voix... Elle me déstabilisais. Elle me rendais fou. Elle était si douce, si gentille. Comment quelqu'un peut-il parler comme cela alors que l'individu auquel il parle vient de faire une tentative de meurtre ? Je le regardai droit dans les yeux avec mes yeux blancs, puis je dérivai mon regard vers le flanc que j'avais touché. Je crus voir une petit touffe de poils sur le sol. Des poils blancs, ou gris ? Je ne voyais pas bien. Ma vision était floue, des larmes et de fatigue.
J'étais fatigué de ma vie de tout ce qui faisait de moi un tout. J'aurais tant aimé changer tout cela juste pour pouvoir me refaire à mon image, et pas comme les autres me souhaitaient. Des images de Pandore la courageuse revinrent dans ma tête. Je l'imaginai en train de m'engueuler, de me frapper, parce que j'avais eu de la pitié, de la gentillesse, pour des loups d'autres clans. En plus, j'étais sur le territoire neutre, alors je n'avais pas à craindre qu'il crie, pour appeler ses congénères, et pour qu'il aie du renfort, qu'ils me tuent sur le coup.
J'inspirai un bon coup, pour faire partir toutes ces pensées diaboliques, et soupirai en fermant un peu les yeux. Je ne voulais plus voir ces images de guerre, de sang, de morts et de malheurs. Je ne voulais plus appartenir à ces tueurs de première. Je ne voulais plus que vivre selon mes propres règles. Quitter le clan est pourtant une chose à ne pas risquer. Peut-être faire comprendre que je ne suis pas un meurtrier ? Non, on me tuera sur le coup.

J'étais trop occupé par mes pensées, et je revins à moi avec un léger sursaut. Mon regard vola dans celui du dénommé Sweenty, avec des yeux écarquillés.

- Asuro.

Puis je réfléchis et méditai les paroles qu'il avait dit. Il était médecin du clan de l'eau, et ce dit pouvoir m'aider. Mon regard se transforma en un regard bien plus sérieux, une lueur diabolique dans les yeux.

- Vous dites tous que vous pouvez me soigner. Mais personne ne peut soigner un esprit qui a été condamné à vivre en meurtrier.

Ma voix se perdit. Déjà qu'elle était tremblante, ma phrase se termina en un simple murmure.
Ainsi, c'était ce que j'étais. C'est tout ce que je pensais de moi.
Un lâche.
Pourquoi avais-je rejoins ce clan, déjà ? Parce que c'était le seul auquel se rapportait ma particularité, je suppose....

- Enchanté, Asuro.

Je le quittai de mon regard. Entendre mon nom par d'autres bouches que la mienne me faisait tellement de drôles de sensations. Un frisson, à nouveau, parcouru mon échine jusqu'à ma queue qui vibra légèrement pour le faire partir. Je regardai le sol, sur le côté. Du coin de l'oeil je voyais les pattes du loup qui me faisait face.
Ce Sweenty était vraiment bizarre. Je viens de lui dire que j'étais un meurtrier, et de nouveau il me répond comme si de rien était, comme si c'était un vieil ami et qu'il me connaissait.

- Ce n'est pas impossible. Je suis persuadé que tout le monde peut être soigné, même un esprit qui, comme tu dis, a été condamné à vivre en meurtrier. Il faut sûrement du temps, de la confiance et d'autres choses encore mais c'est faisable, tu peux me croire.

Sa douce voix reprit. Elle était calme et sans tremblements, un vrai délice aux oreilles fragiles. Je le regardai à nouveau, ne sachant que dire. Il voulait que je lui fasse confiance ? Mais je venais à peine de le voir, de le connaitre et puis... Ohh Pandore, j'ai tellement l'impression de te trahir, toi et ta meute. Je devrais le tuer, le massacrer, le laisser pour mort alors qu'il est en train de se vider de son sang... Non, je n'étais pas comme cela. Mais pourquoi ai-je donc toutes ces idées de morts et de torture ? Je secouai la tête. Il fallait que je remette mes idées en place. Je reposai mon regard sur le visage du loup blanc. Son regard était toujours aussi calme et assuré, et je sentais son regard essayer de me transpercer.

- Il suffit que tu me parles, que tu me racontes ton histoire. Tout. Je sais que ça ne parait pas évident mais il faut me croire...

Que voulait-il savoir ? Pourquoi voulait-il mon histoire ? Pour m'aider ? Je grognai. Un grognement insolite et farouche. Un petit grognement entre les dents pour signifier mes pensées. Il ne pouvait pas m'aider. De toute façon personne ne le peut. C'est ce qu'on m'a déjà dit. On m'a dit qu'il faudra que je vive seul, que je survive sans l'aide de personne.
Mais son calme était trop attirant. Je soupirai, une nouvelle fois, je suppose. Je réfléchissais en même temps, pensant si je devais répondre à ses requêtes, ou mieux pas. Ceux de mon clan diraient que s'il avait le dessus, il valait mieux fuir pour mieux revenir.
Mon regard, d'ailleurs, était fuyant. Je n'arrivais pas à soutenir le regard du loup blanc plus de quelques secondes. Je me sentais soumis et faible.

- J'ai...

Les images revinrent en tête. De terribles images de sang et de meurtres. Je secouai la tête une nouvelle fois, plus vivement, les oreilles claquant sur la nuque, puis fixai mon regard sur un point du front de mon interlocuteur.

- J'ai tué mes parents en étant mit au monde.

Je soupirai.

- Je suis sûr que s'ils savaient ce qui allait leur arriver je n'aurai jamais existé.

Bien que je n'en sois pas très sûr, je le dis quand-même. Mes parents savaient que leur relation était interdite, possible de la pire des punitions: la mise à mort. Et pourtant ils ont continué, et ils m'ont mit au monde. En fait, ce qui les avait trahis, ce n'était pas moi, car j'étais sage et souriant, je ne parlais guère et jappais encore moins. Ce qui les avait trahis, c'était ce foutu loup, sois-disant meilleur ami de mon père, qui avait appelé toute la meute sans vouloir comprendre le pourquoi du comment.
Mes muscles se raidirent. Ces pensées m'enrageaient, aussi lointaines soient-elles.

Il se leva, marcha un peu plus loin ,m'invitant à le suivre, sûrement pour aller sur la plage. Mais pourquoi ? il agissait bizarrement. Je restai assis, le regardant avec des yeux écarquillés.

- Mais... Que s'est-il vraiment passé ? Ne te sens pas coupable d'un crime que tu n'as pas commis.

Un crime que je n'avais pas commis ? Peut-être pas. Mais le fait reste que, si je n'avais pas été né, que je n'avais pas existé, que je n'avais pas rejoins ce monde horripilant et chevrotant, ils seraient probablement encore en vie. Je penchai la tête sur le côté. Je ne le comprenais vraiment pas. il cherchait à m'aider, et pourtant il n'y connaissait rien. Me jugerait-il ? Non. Enfin.. Oui... Ou... Je sais pas. Je ne savais plus.
Je ne savais pas si je devais le suivre ou pas, j'hésitais, parfois faisant de petits mouvements hésitants, mais je ne me levai pas. Le bruit des vagues pourtant m'attirait, pour leur calme et leur sérénité qu'elles apportaient, mais je n'avais pas envie de bouger? Peut-être par flemmardise ?
Je ne fis que regarder le loup en face de moi, en profitant pour mieux détailler ses tatouages et accessoires bizarres sur à peu près tout son corps. D'abord un coeur ailé sur l'épaule droite, les deux pattes arrières avec des bracelets en métal gris, avec une croix et un bâtonnet luminescent. Puis il y avait un éclair sur sa joue, une cicatrice sur sa croupe, bref, on aurait dit toute une histoire en images. Après tout ça il avait encore une crête hérissée noire aux pépites colorées qui reflétaient la lumière. C'était quand-même beau.
Je secouai la tête vivement, une nouvelle fois, et me décidai. Je me levai. Je m'étais décidé. Je fis quelques bonds pour rattraper le loup, tout en souplesse, raclant l'herbe de mes griffes, puis, une fois à côté de lui, je le poussai au niveau de l'épaule, rien de bien méchant, et m'en allai courir un peu plus loin.
Ça manquait d'action, et je le sentais bien. Mes pattes s'étaient engourdies. Je me transformai et commençai à voler dans les airs en virevoltant à toute vitesse, n'hésitant pas à traverser les arbres ou un rocher. Puis je posai une patte à terre, une seule, sur le sable de la plage, et je baillai.

- Je m'ennuie, on joue ?

J'avais pris un ton enfantin, comme un louveteau en manque d'action, ce que j'étais, en quelques sortes.
C'était peut-être bien un moyen de détourner l'attention, car je trouvai que la conversation s'était beaucoup trop intéressée à moi. Pour l’inciter à vouloir me suivre, je me mit à courir à toute allure sur le sable, bien que je ne fis que toucher l'air de mes pattes fantomatiques.