Démon blessé ! [PV Maeya] TERMINE

Maeya marchait. Du sable. C’est tout ce qu’elle voyait. Mais elle n’en avait rien à faire. La louve fredonnait doucement un air triste, en passant sa langue contre ses crocs. Sa canine… elle n’était plus là… Tout ça parce qu’elle n’avait pas écouté Urion quand il lui avait dit qu’il sentait un danger. Elle aurait dû se méfier. Elle ne l’avait pas fait… Elle en avait souffert. Mais maintenant, ce qui la rendait triste, ce n’était pas vraiment la souffrance qu’elle avait ressentit, c’était l’inquiétude qu’elle savait qui traverserait le visage de Plagio lorsqu’il la reverrait. Pendant un instant, elle avait eu un moment si beau… et puis… Si elle avait su, jamais elle n’aurait été à cet endroit.

Quelque chose attira son regard. Une tache. Une tache d’une autre couleur que sable. Elle regarda et identifia ce que c’était. Un loup. Couché dans le sable. Il était mort ou endormi? Elle avança prudemment. Était-ce un piège? Elle sentit bientôt l’odeur du sang. Ce loup était blessé! Elle oublia tout ce qui pouvait la contraindre. Prudence, peur, plus rien. Elle était inquiète. Elle courut jusqu’au loup et le regarda. Finalement, il n'était pas couché, juste accroupi. Cela ne changeait pas la situation : elle ne savait pas comment soigner! Elle savait par contre où trouver un médecin. Plagio… Il était loin, mais c’était le seul qu’elle connaissait.

- Est-ce que ça va? Pouvez-vous m’entendre? Êtes-vous capable de vous relever? Vous êtes blessé, vous devez voir un médecin! J’en connais un sur le territoire de l’eau, si vous pouvez marcher nous y irons. Si vous en connaissez un plus près, indiquez-moi où le trouver!

Elle espérait sincèrement qu’il n’avait rien de grave. Il aurait pu être du clan de la mort que cela ne changerait pas sa position. Selon elle, tous les loups avaient le droit à la vie. Sauf Pandore…

Le louve eut peur en entendant le craquement. Il était mal en point, elle ne pourrait pas le traîner jusqu’à un médecin, effectivement. Elle s’approcha un peu plus, de plus en plus inquiète. Elle ne voulait pas qu’il meurt.

- Cessez de bouger, vous aggraver votre cas. Bon… comme vous n’êtes pas en état de marcher, je vais m’occuper de vous au mieux de mes connaissances, et aller vous chercher un médecin après, pour vous le ramener ici.

Elle examina le loup et repéra la blessure. Elle renifla un peu. Pas d’infection. Ce loup avait de la chance. Et aussi que la blessure n’était pas aussi terrible que l’avait cru Maeya. Elle soupira de soulagement.

- Je vais nettoyer votre blessure, pour qu’elle ne s’infecte pas. Ne faîtes pas traîner votre patte n’importe où en attendant que des meilleurs soins vous soit prodiguer. Si vous le désirez, j’irai chercher un médecin, sinon, cela cicatrisera tout seul, à condition de ne pas marcher sur cette patte.

Avoir un compagnon médecin avait ses utilités. Maeya avait appris quelques bases de premier secours avec Plagio. Sans attendre la réponse du loup, elle commença à lécher doucement la plaie, mais tout de même assez fortement pour en nettoyer les sable qui s’y était infiltré.

La solitaire arrêta et eut un léger recul en entendant le loup grogner. Mais il s’excusa. Elle recommença donc l’opération. Lorsque la plaie fut nettoyée, elle leva son regard pour regarder les yeux du mâle. Ses yeux étaient effrayants. Ils étaient si rouges! Elle détourna le regard. Un peu gênée, elle dit :

- Voilà, j’ai nettoyé la plaie. Avez-vous soif? Voulez-vous que j’aille chercher un médecin, ou vous préférez que cela guérisse seul? Si vous voulez, je peux chanter un peu pour vous détendre…

Son sang… avait un goût si étrange. Ce loup… il était du clan de la mort, elle en était sûre. Mais comme il n’avait rien fait de mal envers elle, cela ne lui dérangeait pas de continuer à s’occuper de lui. Et puis, s’il était vraiment du clan de la mort, il ne voudrait pas voir de médecin, puisque de toute façon il ne pouvait pas vraiment mourir. Enfin, c’était ce que les rumeurs disaient. Était-ce vrai? Elle aimerait bien lui poser des questions, mais en ce moment, elle sentait que c’était déplacé.

La peur de Maeya augmenta. Comment? Était-ce si visible? Une phrase d’Urion lui revint en mémoire. Les yeux sont les miroirs de l’âme. Elle avait croisé le regard du loup… Il l’avait lu dans ses yeux, donc… Elle se calma un peu. Il n’avait pas l’air de lui vouloir du mal et semblait reconnaissant envers elle. Cela ne servait à rien de paniquer pour l’instant.

- Je… Mon passé ne vous concerne pas. Ce qui est arrivé est arrivé, et on ne peut pas le changer. Non, si je suis méfiante, c’est parce que… les rumeurs sur les loups du clan de la mort sont… effrayante. Et… Vous êtes l’un d’eux, n’est-ce pas? Écoutez, je ne crois pas que ce soit mal d’être au service de Pandore, car je sais que certains n’ont pas le choix. Mais quand même, c’est un peu difficile de ne pas angoisser un peu en se disant que celui qui est devant nous à peut-être l’intention de nous manger, et qu’on ne pourrait même pas se défendre…

Elle regarda le sol.

- S’il vous plaît ne vous fâchez pas… Je veux vous aider.

Maeya plongea son regard dans les yeux du loup. Il semblait si sincère… si gentil… Comment avait-il atterrit dans le clan de la mort? Était-il seulement de ce clan? Et si elle se trompait? Il n’avait pas essayé de la détromper, mais ne l’avait pas confirmée non plus. Mais… lui parler de son passé? Il n’avait pas besoin de tout savoir… Juste l’essentiel. Et puis, elle pouvait bien lui dire, qu’est-ce que ça changeait?

- Ce n’est rien de vraiment important. Vous savez, c’est seulement qu’avant quelques semaines, tous les mâles que je croisais tentaient de me tuer. J’ai développé un peu une sorte de méfiance envers eux. Mais je sais que vous n’avez pas l’intention de me faire du mal, je le vois dans vos yeux. Alors… est-ce que vous vous sentez mieux? Je ne voudrais pas que vous souffriez, vous savez. J’ignore comment vous avez eu cette blessure, mais ce n’est pas important. Vous êtes un loup, vous méritez de pouvoir vous sentir bien.

Elle laissa son regard plongé dans celui du mâle. Ce qu’elle ressentait en ce moment, c’était de la compassion. Et puisqu’il ne voulait pas d’un médecin (et elle comprenait ses motivations!) elle allait au moins rester un peu avec lui.

La peur remonta en elle un instant. Un démon? Mais rapidement elle diminua. Son histoire était si triste… pire encore que celle de Maeya… Elle avait tant envie de le réconforter. Instinctivement, elle se colla sur lui, faisant attention à ne pas toucher sa patte blessée, et lui donna un coup de langue réconfortant sur la joue.

- Que vous soyez un démon ne me dérange pas. Vous êtes gentil… enfin, avec moi. Peut-être est-ce seulement à cause que je vous ai aidé, mais cela ne change rien pour moi. Je vois de la sincérité dans votre regard. Pour le tutoiement, cela ne me dérange pas du tout. Je me sens mal à l’aise quand on me vouvoie. Je ne suis pas importante, je n’ai pas de raison qu’on m’en accorde. Vous savez… je suis triste pour ce qui vous est arrivé, et j’aimerais vous aider. Mais je ne peux pas…

Elle retint une larme. Elle aimerait tant faire quelque chose.

- Tout ce que je peux vous proposer, c’est de vous chanter une chanson. Je ne sais rien faire d’autre.

La louve fut gêné en entendant Seth parler. Le tutoyer? Euh… bon d’accord…

- Eh bien… d’accord… Seth. Je te tutoierai. Moi, je me nomme Maeya.

Seth… un nom qui allait très bien à un démon. Mais elle l’appréciait. Démon, c’était une nature, pas un indice de comportement. Il était très gentil, et elle espérait qu’il n’aurait pas de problèmes avec sa patte. Lentement, un son s’éleva dans sa gorge, rythmé, mélodieux, donnant l’air de la chanson à venir. Puis elle commença à chanter, les yeux fermés, doucement, murmurant presque à l’oreille du mâle les paroles apaisantes.

- La vie se divise toujours en deux
La première partie est cruelle et sanglante
La seconde s’emploie à exaucer nos vœux
Le tout fini toujours sur une fin bienveillante.

Si l’on sait comment voir les pièges tendus
Par la cruauté, et les éviter
C’est facile de trouver un bonheur mérité
Et de constater tout le bien apparu.

Un loup sage m’a dit cela un jour
Et alors j’ai compris
Il faut espérer, encore et toujours
Sans se décevoir de ce que l’on n’a pas choisi.

Ne laisses pas ta vie t’être dicté
Attends le bon moment et tu verras
Si tu as su faire les bons choix
Tu pourras la vie apprécier.

Elle espérait qu’il allait apprécier, et que les paroles ne le frustreraient pas… Elle repensa à Urion. C’était de lui qu’elle tenait cela. Il ne l’avait pas dit de la même façon, mais il l’avait dit. C’était grâce à cela qu’elle avait enfin pu commencer à aimer la vie qu’elle menait. Grâce à cela et à Plagio.

Maeya écouta l’incantation pour la mémoriser. Oui, elle la retiendrait. Et elle s’en servirait si jamais cela devenait nécessaire, mais…

- Tu ne me dois rien Seth. Je t’ai aidé parce que j’en avais envie, pas pour te demander une faveur en retour. Et si tu m’aides, je veux que tu m’aides pour cette même raison. Parce que tu ressent le désir de m’aider, pas l’obligation.

Elle se décolla de sur lui et s’assit devant lui pour le regarder. Elle ne voulait pas partir tout de suite.

- J’aime chanter, et je le fais dès que j’en ai une raison. Pour ce qui est de la guerre, elle ne sépare pas nos clans. Sinon je ne te parlerais pas, n’est-ce pas? C’est Pandore qui peut nous empêcher de partager un bon moment ensemble. Tu sais… je ne suis pas la seule à raisonner ainsi. Si tu te montres gentil, je suis certain que les autres loups ne tiendront pas compte de tes origines et voudront tout de même de ton amitié. Ne décourages pas Seth. Et si tu veux, je peux te présenter quelques loups qui voudront certainement être tes amis!

Elle lui sourit gentiment et amicalement, et attendit la réaction du mâle. Elle ne voulait pas le brusquer.

Maeya fut surprise. Une question sur lui? Elle en avait bien oui… Pas sûr lui en tant que tel, mais…

- Eh bien… en réalité, j’ai bien une ou deux questions, mais… je ne sais pas, ce n’est pas vraiment toi que ça concerne et je ne suis pas certaine que tu ait le droit de me répondre.

Elle se sentait.. gênée… Elle regarda le sol et perdit son sourire.

- En fait… je trouve étrange que tu souffre d’une blessure. N’es-tu pas mort? Cela ne devrait pas t’affecter, si tu n’es pas vivant, non? Mais je… excuses-moi, je suis trop curieuse.

Mal à l’aise, elle regarda vers le soleil.

Maeya comprenais mieux… ainsi donc, il n’était pas mort. Alors, il pouvait mourir! Ce qui fait qu’elle avait encore plus de raisons de s’inquiéter! La remarque sur le sang la fit sursauter. Du sang? Elle regarda Seth dans les yeux et passa sa langue sur ses crocs. Son regard se voilà de tristesse alors que sa langue passait sur le trou où aurait dû se trouver sa canine.

- C’est que… la nuit dernière, j’étais à la falaise, pas très loin d’ici. Je ne sais pas vraiment ce qui s’est passé. J’ai eu mal, et je saignais. La première chose que j’ai remarqué était que l’un de mes crocs avait disparut… pourtant, il n’y avait aucun autre loup avec moi, juste la lune.

Elle fit un sourire.

- Ce n’est rien de grave, cros moi. Le sang a séché, et je n’ai pas pu le nettoyer, car je n’ai pas encore croisé d’eau. Mais ça ne fait plus mal maintenant.

Peut-être y avait-il aussi un peu du sang de Seth. Il aurait été facile de mentir et de prétendre que ce n’était que ça. Mais Maeya détestait mentir. Elle était honnête, toujours.

- Tu n’as pas à t'inquiéter, je m’en sortirai. Lorsque je reverrai mon compagnon, il saura quoi faire pour m’aider. Mon croc ne pourra pas repousser, mais je m’y ferai à la longue.

Elle regarda la patte blessée du loup.

- Tu te sens bien? Tu n’as pas trop mal? Si tu veux, je peux aller essayer de te trouver un peu d’eau, tu dois avoir soif.

Maeya étudia la proposition. Faire repousser son croc? Oui, ce serait… tellement une bonne chose.

- J’aimerais bien oui. Mais… est-ce que ça va me faire mal? Je… je n’aime pas souffrir. Et juste pour un croc, je ne trouve pas cela équitable. Je peux m’en passer, de mon croc. Et je n’ai pas aimé souffrir, je ne veux pas recommencer.

Elle préférait nettement rester ainsi que de souffrir de nouveau. Si Seth ne pouvait pas la soigner sans douleur, tant pis. Elle attendit la réponse.

Maeya fut déçue. Elle aurait bien aimé récupérer son croc. Mais bon, elle pouvait s’en passer, elle l’avait dit.

- Ce n’est pas grave, Seth. Tu as essayé, et ça compte beaucoup pour moi. Et puis ce n’est pas comme si je ne pouvais pas survivre sans mon croc. Cela me fera un peu étrange un certain temps, mais je m’y habituerai.

Pour lui montrer sa reconnaissance, elle s’approcha de lui et frotta légèrement son museau contre le sien en souriant aimablement.

- Je te suis très reconnaissante.

Elle s’écarta d’un pas et s’assit à nouveau, rivant son regard dans celui de Seth.

- Y a-t-il quelque chose que je puisse faire pour te faciliter un peu la vie pendant que ta patte guérit?

Elle ferait tout pour qu’il n’ait pas à souffrir. Elle avait connu la souffrance… c’était si horrible. Elle ne voulait pas qu’un autre loup ne vive cela.